Cerise galactique

Cerise galactique

Épisode 3

Épisode 3

 

–   Tes parents sont morts, Amy. Je te l'ai déjà dit. Comme tu n'as pas de frère ou de sœur, nous t'avons attiré jusqu'à la Maison des Recrues. Ici, nous étions sûrs que tu ne pourrais pas t'échapper et que tu comprendrais que l'on ne veut que ton bien. Mal­heureusement, Johanna est morte avant même de t'avoir expliqué ce qu'on attend de toi.

–   Comment est-elle morte ?

–   Tu m'a déjà posé cette question, Amy, et je t'ai déjà répondu.

–   Je le sais, mais c'est quoi, un espion de l'Ombre ?

–   Tu dois d'abord savoir qui est l'Ombre. On t'apprendra tout ça quand on sera arrivés. Tu suivras des cours d'histoire et tu sauras qui est l'Ombre.

–   Je veux le savoir maintenant. J'ai vu une personne mourir sous mes yeux et je ne sais presque pas pourquoi.

–   Tu attendras les cours, Amy. Nous n'avons pas le droit d'enseigner quoi que ce soit aux élèves car ils doivent entrer dans l'Académie avec le même niveau.

–   Je vois, grommelai-je en me mordillant la lèvre.

–   Donc, je disais que tu apprendras qui est l'Ombre une fois arrivée à l'Académie. Nous t'avons retiré de ta famille avant sa mort. Johanna a dû te le dire, tu n'étais pas dans un vrai couloir et il n'existait pas de fête. Notre but était de faire de toi une recrue dé­jà expérimentée. Certaines personnes à qui la lettre a été envoyée ne sont pas venues et nous les avons éliminées.

–   Vous les avez tuées ? Demandai-je, horrifiée.

–   Non, nous ne tuons personne. Éliminer quelqu'un veut dire lui faire oublier ce qu'on lui a mis dans la tête.

–   C'est impossible.

–   Écoute, Amy. J'ai la patience de tout t'expliquer, ce que font rarement les respon­sables. Soit tu écoutes et tu gardes tes questions et tes observations dans la tête en at­tendant notre arrivée ; soit j'arrête tout de suite pour que tu me laisse tranquille.

–   Je choisi la première proposition.

–   Très bien. Alors, tu es ici, en route pour l'Académie car tu as plusieurs dons. Des dons très rares et surtout, très spéciaux. Ce n'est as le genre de don qui fait que tu dessines parfaitement bien, qu'un avenir de danseuse étoile t'attend, que tu sera cham­pionne de natation ou bien que tu seras virtuose au violon. Tu possèdes des dons ex­ceptionnels. Par exemple, tu peux contrôler les esprits des gens, léviter en l'air, dépla­cer des objets par la seule force de ton cerveau et pleins d'autres choses de ce genre ! Une fois à l'Académie, tu apprendras quels sont tes « dons ». c'est tout ce que je peux te dire pour le moment.

–   Et pourquoi il y a un…

–   Ah, oui ! L'uniforme est obligatoire à l'Académie. Toutes les filles ont le même pour les trois premières années. À partir de la quatrième année, vous aurez des uniformes en fonction de ta « spécialité ». je suppose que tu as plusieurs questions ?

–   Oui, la première, c'est que je ne comprends pas comment…

–   Tu m'as dit que tu attendrais notre arrivée à l'Académie. Bien, maintenant, je te laisse faire connaissance avec ton uniforme, ajouta-t-il en souriant.

–   Très drôle. Et en plus, j'aime pas les collants en laine.

–   Ce n'est pas mon problème.

            Après avoir inspecter son uniforme, Amy s'empara d'une tasse en porcelaine et la remplit de jus d'orange. Tout en sirotant son jus, elle survolait le règlement de l'Académie d'un œil las.

            « C'est le même pour toutes les écoles » pensa-t-elle avant de remarquer une phrase étrange.

            Il est interdit aux élèves de sortir de leur chambre entre vingt-trois heures cinquante-trois et une heure sept.

            « Mais qu'est-ce que ce règlement ? »

            Amy jeta la feuille sur la banquette d'en face et s'empara d'un paquet de biscuits qui se trouvait sur une petite étagère.

            - Nous sommes arrivés, annonça Steve.

            - J'arrive, répondis-je en prenant mon uniforme et le règlement de l'Académie.

            Je n'arrivais pas à croire ce que je voyais. L'Académie était en fait un immense bâti­ment comportant au moins cinq étages, sans compter le rez-de-chaussée. Une vaste pelouse permettait aux élèves de se détendre pendant les pauses et une tour en pierre se dressait sur toute sa hauteur, près du réfectoire. J'avais vraiment du mal à croire que ce serait mon nou­veau collège. Alors que j'admirais les alentours, Steve me saisit par le bras et me demanda :

            - C'est aujourd'hui ou demain que tu entres ?

            - C'est bon, j'arrive...

            Steve partit d'un pas énergique vers une grande porte en verre épais. En lui emboîtant le pas, j'eus le temps de constater que d'autres élèves arrivaient de plusieurs voitures semblables à la mienne. Certaines voitures comportaient plusieurs élèves à la fois, d'autres, comme la mienne, se contentait d'en prendre qu'un seul.

            Les deux lourdes portes de ce qui semblait être du verre étaient ouvertes. Le hall faisait au moins la taille de trois terrains de tennis, sans compter la sorte de mini-cafétéria située juste à côté. Une estrade en bois avait été installée pour l'occasion, ainsi qu'une bonne cinquantaine de banc juste en face pour permettre aux élèves de s'asseoir. Certains élèves avaient l'air de se connaître et rigolaient ensemble, d'autres étaient un peu délaissés, comme moi. Steve était parti « faire un tour », selon lui mais j'avais bien compris qu'il ne reviendrait pas.

            Après m'être installée à la deuxième rangée de bancs, je remarquai une femme âgée vêtue d'une longue cape verte en velours et d'une paire de bottines en cuir de couleur noire. Une autre femme, plutôt jeune la suivait, vêtue de la même manière excepté la couleur de sa cape qui avait une teinte jaune moutarde. En voyant la suite des personnes, tous vêtus d'une cape de couleur différente, je compris qu'il s'agissait de nos professeurs. Les professeurs apparurent dans la salle et s'alignèrent sur l'estrade en arc de cercle. Après quelques minutes, un homme tellement âgé que l'on aurait cru qu'il portait un masque fit son apparition, cette fois-ci différente des autres. Il ne marchait pas, il volait. Il arrivait lentement, scrutant tous les visages de l'assemblée, visiblement heureux puis se posta sur l'estrade, souriant aux professeurs. Sa longue robe de velours noire semblait peser lourd sur ses frêles épaules mais il n'avait pas l'air d'en avoir conscience. Soudain, une voix froide et rocailleuse commença à parler avec de léger toussotements :

            - Bienvenue à tous.  Vous devez tous savoir ce que vous faites ici. Vos instructeurs ont dû vous expliquer les raisons de votre venue et vous avez tous lu le Règlement de l'Académie, si je ne m'abuse.

            - Moi, je ne l'ai pas lu, gloussa une fille près de moi.

            - Mademoiselle Lerrois a une remarque, je crois?demanda la voix.

            - Euh...non, pas du tout, répondit la fille, embarrassée et ne sachant où regarder.

            - Très bien, je poursuis, alors. Voici Madame Rustick, en vert, votre professeur d'études de la végétation et de sciences. Ensuite, nous avons Monsieur Citrus, en bleu, votre professeur d'études aux forces de l'esprit, Madame Glautt, en violet, votre professeur d'histoire des esprits, Madame Frenchstein, en gris, votre professeur d'allemand, Madame Latium, en rose, votre professeur de latin et enfin Monsieur Egnarte, en rouge, votre professeur de matières générales. Avez-vous des questions avant la Cérémonie de Répartition des chambres ?

            Une seule main se leva, tout au fond du hall. Je n'arrivais pas à voir à quoi ressemblait cette personne à cause de la foule trop dense mais je reconnus la voix d'une fille.

            - Est-ce que Madame Teens fera partie de nos professeurs ?

            - Est-ce que vous l'avez entendu, mademoiselle Perkins ?

            - Non.

            - Alors vous connaissez la réponse. Bien, je vais laisser place à Steve, votre instructeur principal.

            - Bonjour à tous et bienvenue à vous, commença Steve en cherchant quelqu'un du regard parmi l'assemblée. J'ai l'honneur de présider la Cérémonie de la Répartition pour la sixième fois consécutive. Dans l'aile des filles, pour la chambre numéro une, j'appelle Clara Perkins et Melissa Stick.

            De filles, dont celle qui avait fait la demande de Madame Teens, se levèrent avec mille et unes manières et avancèrent vers l'estrade. Crispé, Steve leur remis un médaillon de cuivre, avec un pendentif représentant leurs initiales. Clara et Melissa, qui devaient êtres des meilleurs amies, se sourirent et partirent joyeusement vers la cafétéria. Au bout de la chambre numéro treize, Steve sourit et annonça d'une voix solennelle :

            - Je nomme pour la chambre numéro treize, Amy Williams et Brianna Lewis.

            Je me levai de ma chaise et me dirigeait vers l'estrade. Comme ma colocataire ne venait pas, Steve répéta son nom une deuxième fois. Personne ne bougea. Agacé, Steve déclara que l'élève devrait prendre la chambre restante et annonça que j'aurai une chambre pour moi toute seule. Quelques cris de protestations fusèrent dans l'assemblée. C'était génial, je m'étais fait des ennemis dès le premier jour. Steve me remit le médaillon et m'ordonna d'aller directement dans ma chambre. En marchant vers l'escalier central, j'eus l'impression que quelqu'un me regardait. Inquiète, je pressai le pas et ne tardait pas à arriver devant ma chambre. À ma grande surprise, je constatai que la porte était verrouillée. En réfléchissant un peu, je compris rapidement que le médaillon qui m'avait remis Steve était la clé de la chambre.

            Dès que la porte s'ouvrit, une forte lumière blanche puissant me força à plisser les yeux et mettre mes mains en visière. Soudain, tout sembla redevenir normal et je pus entrer tranquillement dans ma chambre. Celle-ci était aussi grande que ma dernière chambre et était décorée de façon ancienne, avec un lustre pour éclairer la pièce. Un grand lit baldaquin aux rideaux de velours noir était installé contre le mur. En face, une armoire en bois servait en même temps de support pour une longue affiche stipulant le Règlement Intérieur et Extérieur de l'Académie. Un magnifique bureau avait été placé près de l'entrée, comportant plusieurs tiroirs dont un de couleur différent. Curieuse comme je suis, je ne pus m'empêcher d'ouvrir chaque tiroir, et, à ma grande déception, je ne découvris que des livres, des manuels, des cahiers et un bloc de feuilles à dessin. J'ouvris également mon armoire et ne fus pas surprise d'y voir mon uniforme, parfaitement repassé, ainsi que ma paire de ballerines vernies. Il y avait aussi deux jeans, quelques uns de mes pulls ; qui, je ne sais comment, s'étaient retrouvés ici ainsi qu'une paire de bottes et de tennis. Alors que je m'apprêtais à explorer les tiroirs du lit, quelqu'un frappa à la porte.

            - Bonjour, dis-je à Clara, la tête dans l'embrasure de la porte.

            - Salut. C'est pour te dire que tu dois descendre en salle de préparation pour le costume de demain soir. En fait, toutes les Premières Années ont été appelées, mais comme tu ne venais pas, j'ai dû venir te chercher.

            - Ah, OK, j'avais pas entendu. Il faut mettre son uniforme ?

            - Non, tu viens en pyjama, ironisa Clara en levant les yeux aux ciel.

            - Bon, d'accord. J'arrive.

            - Je dois t'attendre. Tu comptes me laisser dehors ?

            - Non, vas-y, entres...

            En ouvrant la porte de ma chambre pour permettre à Clara d'entrer, j'entendis un grattement provenant du sol. Clara, inquiète, recula et palpa son médaillon en murmurant des incantations étranges. Comme je ne réagissais pas, Clara sortis de la chambre, les yeux exorbités et me demanda de la suivre. Peu de temps après, le directeur de l'Académie arriva et prit un air désolé.

            Ce qu'il dit me bouleversa.



24/02/2016
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